(Les Faux Monnayeurs, Romans, p. 1215). Il est bon de suivre sa pente, pourvu que ce soit en montant.
Ma propre position dans le ciel, par rapport au soleil, ne doit pas me faire trouver l'aurore moins belle.
Familles, je vous hais ! foyers clos , portes refermées, possessions jalouses du bonheur.
À quoi reconnais-tu que le fruit est mûr ? - À ceci, qu'il quitte la branche.
Comme j'irais bien, sans tous ces gens, qui me crient que je vais mal !
La chose la plus difficile, quand on a commencé d'écrire, c'est d'être sincère.
Que l'importance soit dans ton regard, non dans la chose regardée.
Fais ton bonheur d'augmenter celui de tous.
Mon esprit est avant tout ordonnateur. Mais mon coeur souffre de laisser rien à la porte.
Comme Chopin par les sons, il faut se laisser guider par les mots.
Pour bien juger, il faut s'éloigner un peu de ce que l'on juge, après l'avoir aimé Cela est vrai des pays, des êtres et de soi même.
La nécessité de l'option me fut toujours intolérable, choisir m'apparaissait non tant élire, que repousser ce que je n'élisais pas.
Un bonheur fait d'erreur et d'ignorance, je n'en veux pas.
Connais toi toi même. Maxime aussi pernicieuse que laide. Quiconque s'observe arrête son développement.
C'est mon enfance solitaire et rechignée qui m'a fait ce que je suis. (Journal, 10 juin 1891, p. 131)
La mélancolie n'est que de la ferveur retombée.
Les rapports de l'homme avec Dieu m'ont de tout temps paru beaucoup plus importants et intéressants que les rapports des hommes entre eux.
C'est du point de vue de l'art qu'il sied de juger ce que je j'écris [...] C'est du reste le seul point de vue qui ne soit exclusif d'aucun des autres.
Ce n'est pas seulement le monde qu'il s'agit de changer , mais l'homme.
On appelle joie cet état de l'être qui n'a besoin de rien pour se sentir heureux.
Dieu, disait Ménalque, c'est ce qui est devant nous.
L'exigence de mon oreille, jusqu'à ces dernières années, était telle, que j'aurais plié la signification d'une phrase à son nombre.
Je parviens bien difficilement, bien rarement, à avoir le même âge tous les jours.
Savoir se libérer n'est rien , l'ardu, c'est savoir être libre.
Que mon livre t'enseigne à t'intéresser plus à toi qu'à lui même, - puis à tout le reste plus qu'à toi.
Toutes choses sont dites déjà, mais comme personne n'écoute, il faut toujours recommencer.
Je n'ai jamais bramé pour personne.
Il est bien peu de monstres qui méritent la peur que nous en avons.
Que ta vision soit à chaque instant nouvelle. Le sage est celui qui s'étonne de tout.
Attendons de partout la révélation des choses ; -- du public, la révélation de nos oeuvres.
Je sens en moi, certains jours, un tel envahissement du mal, qu'il me semble déjà que le mauvais prince y procède à un établissement de l'Enfer.
Un personnage ne m'intéresse jamais tant que lorsqu'il est créé tout entier, comme Ève, de la chair même de l'auteur; non point tant observé qu'inventé.
Un grand homme n'a qu'un souci devenir le plus humain possible,-- disons mieux devenir banal.
J'ai connu ce destin bizarre (peut-être unique) d'être magnifié par l'attaque avant de l'avoir été par l'éloge.
Je tiens que la meilleure explication d'une oeuvre ce doit être l'oeuvre suivante.
Il faut porter jusqu'à la fin toutes les idées qu'on soulève.
Dans un monde où chacun se grime, c'est le visage nu qui paraît fardé.
Dans l'oeuvre d'art [..], Dieu propose et l'homme dispose.
Je ne puis admirer pleinement le courage de celui qui méprise la vie.
Nous ne valons que par ce qui nous distingue des autres ; l'idiosyncrasie est notre maladie de valeur.
Je crois maladroit, improfitable, ininstructif de se mettre uniquement sur le plan du bien et du mal pour juger les actions humaines, ou plus exactement, pour en apprécier la valeur.
Du jour où je parvins à me persuader que je n'avais pas besoin d'être heureux, commença d'habiter en moi le bonheur.
Le propre du diable dont le motif d'introduction est : « Pourquoi me craindrais tu ? Tu sais bien que je n'existe pas. »
Aucunes choses ne méritent de détourner notre route ; embrassons-les toutes en passant ; mais notre but est plus loin qu'elles.
J'aimerais mieux marcher aujourd'hui sur les mains, plutôt que de marcher sur les pieds -- comme hier !
Le secret du grand romancier n'est pas dans la domination des situations, mais bien dans la multiplicité de ses possibilités, de ses complicités intimes.
C'est parce que tu diffères de moi que je t'aime ; je n'aime en toi que ce qui diffère de moi.
Chaque être ne comprend vraiment en autrui que les sentiments qu'il est capable lui même de fournir.
Quand un philosophe vous répond, on ne comprend plus du tout ce qu'on lui avait demandé.
Supprimer en soi l'idée de mérite ; il y a là un grand achoppement pour l'esprit.
Ce qui échappe à la logique est le plus précieux de nous-même.
Les bourgeois honnêtes ne comprennent pas qu'on puisse être honnête autrement qu'eux.
Inquiéter, tel est mon rôle.
Supprimer en soi le dialogue, c'est proprement arrêter le développement de la vie. Tout aboutit à l'harmonie.
L'important n'est pas tant d'être franc que de permettre à l'autre de l'être.
Les plus douteux égarements de la chair m'ont laissé l'âme plus tranquille que la moindre incorrection de mon esprit.
Ce qu'on appelle un « esprit faux » [...] -- eh bien ! je m'en vais vous le dire : c'est celui qui éprouve le besoin de se persuader qu'il a raison de commettre tous les actes qu'il a envie de commettre ; celui qui met sa raison au service de ses instincts, de ses intérêts, ce qui est pire, ou de son tempérament.
À mesure qu'une âme s'enfonce dans la dévotion, elle perd le sens, le goût, le besoin, l'amour de la réalité.
Ce sont nos larmes seulement qui font germer autour de nous les tristesses.
Du rassasiement des désirs peut naître, accompagnant la joie et comme s'abritant derrière elle, une sorte de désespoir.
Je n'aime pas les hommes , j'aime ce qui les dévore.
En vérité, le bonheur qui prend élan sur la misère, je n'en veux pas.
Formes diverses de la vie, toutes vous me parûtes belles.
Jamais un homme, je ne serai qu'un enfant vieilli. Je vis avec l'inconséquence d'un poète lyrique.
Ne souhaite pas, Nathanaël, trouver Dieu ailleurs que partout.
Comédien ? peut-être, mais c'est moi-même que je joue.
Les choses les plus belles sont celles que souffle la folie et qu'écrit la raison.
Ne sacrifie pas aux idoles.
Je sens en moi l'impérieuse obligation d'être heureux.
Ce qui nous touche de trop près n'est jamais de conquête bien profitable.
Ne laisse plus le poids du plus léger passé t'asservir.
Il n'y a pas de problème, il n'y a que des solutions. L'esprit de l'homme invente ensuite le problème.
Les Mémoires ne sont jamais qu'à demi sincères, si grand que soit le souci de vérité tout est toujours plus compliqué qu'on ne le dit. Peut-être même approche-t-on de plus près la vérité dans le roman.
C'est vers la volupté que s'efforce toute la nature.
L'art naît de contrainte, vit de lutte, meurt de liberté.
Assumer le plus possible d'humanité, voilà la bonne formule.
Chaque animal n'est qu'un paquet de joie.
La perfection classique implique, non point certes une suppression de l'individu (peu s'en faut que je ne dise : au contraire), mais la soumission de l'individu, sa subordination, et celle du mot dans la phrase, de la phrase dans la page, de la page dans l'oeuvre. C'est la mise en évidence d'une hiérarchie.
L'oeuvre classique ne sera forte et belle qu'en raison de son romantisme dompté.
J'ai souvent pensé [...] qu'en art, et en littérature en particulier, ceux-là seuls comptent qui se lancent vers l'inconnu. On ne découvre pas de terre nouvelle sans consentir à perdre de vue, d'abord et longtemps, tout rivage. Mais nos écrivains craignent le large; ce ne sont que des côtoyeurs.
J'ai si grand'peur, et il me déplairait tant, de laisser la passion incliner ma pensée, que c'est souvent au moment qu'il me veut le plus de mal que je suis tenté de dire le plus de bien de quelqu'un.
Car sache que, dans les Enfers, il n'est pas d'autre châtiment que de recommencer toujours le geste inachevé de la vie.
Pas plus que de considérer la jeunesse seulement comme une promesse, sied-il de ne voir dans la vieillesse qu'un déclin. Chaque âge est capable d'une perfection particulière.
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