Le Gay Savoir

 

Henriette Charasson

15 mai 1914

"Revue des Revues"

[Le livre de Gide était attendu comme un roman "d’aventures"] À la vérité, malgré les complications et les imbroglios voulus par l'auteur (car ce n'est pas son imagination qui d'elle même l'y entraîne) Les Caves du Vatican reste une œuvre psychologique, et presque chaque personnage, de Lafcadio à Julius de Baraglioul, perd son temps à s'analyser minutieusement au lieu d'agir, ce qui est contraire à l'essence même du roman d'aventures. D'Artagnan ne se reconnaîtrait pas dans les héros gidiens, chez qui nous retrouvons au contraire les angoisses intellectuelles, et parfois artificielles, du cher Tityre de Paludes. Ajouterai-je que Lafcadio est proche parent de Nathanaël des Nourritures terrestres, comme d'André Walter, comme de Jérôme de La Porte étroite ? Il y a toujours quelque chose de contraint, de faussé – dans le plaisir comme dans la tristesse, – chez tous les êtres créés par André Gide, et c'est ce qui donne un caractère si particulier, séduisant ou repoussant selon les lecteurs, à chacun de ses livres. [...]